L'affaire Boulin a connu mardi un nouvel épisode. Non seulement une partie du dossier judiciaire a disparu, mais le parquet général s'est opposé à la deuxième demande de réouverture de l'enquête sur la mort de l'ancien ministre, dont le corps a été découvert dans un étang en 1979.
Le procureur général de la cour d'appel de Paris, François Falletti, a indiqué à la fille de M. Boulin, Fabienne Boulin-Burgeat et à son avocat, Me Olivier Morice, qu'il s'opposait à la réouverture de l'enquête judiciaire estimant qu'il n'y avait pas de charges nouvelles, a annoncé le parquet général.
Fabienne Boulin-Burgeat avait déposé le 25 mars une deuxième demande de réouverture de l'enquête. Elle souhaitait notamment des expertises génétiques sur les enveloppes et lettres où l'ancien ministre annonçait son suicide, afin de déterminer qu'il en était bien l'auteur. Depuis des années, la famille soutient la thèse d'un assassinat maquillé en suicide. En 2007, le parquet général avait rejeté une première demande de réouverture de l'enquête. Le dossier avait alors été consulté.
"Les originaux, une partie essentielle du dossier, à savoir les lettres qui étaient placées sous scellés ont disparu parce que nous demandions des explications : on se moque de la famille Boulin depuis des années", a pesté mardi Me Olivier Morice, l'avocat de Fabienne Boulin-Burgeat.
De son côté, le parquet général assure que "les recherches se poursuivent activement" pour retrouver les éléments manquants. Ce dossier était conservé dans un coffre-fort, selon une source judiciaire. Le parquet général n'est pas en mesure de déterminer quand ces pièces ont pu disparaître.
"C'est non seulement scandaleux mais au surplus ça alimente incontestablement les accusations d'un véritable complot pour empêcher que toute la vérité soit faite sur les circonstances de la mort de Robert Boulin", a ajouté Me Morice.
Mardi matin, le porte-parole du ministère de la Justice a annoncé que la garde des Sceaux avait ordonné une enquête de l'Inspection générale des services judiciaire pour faire toute la lumière sur cette disparition. La semaine dernière, Michèle Alliot-Marie avait considéré que le dossier était clos en l'absence d'éléments nouveaux.
Les dossiers sont archivés au palais de Justice mais dans le cas de dossiers sensibles comme peut l'être considéré le dossier Boulin, ils sont stockés dans des coffres-fort, a-t-on expliqué à l'Associated Press de source judiciaire.
Nonobstant cette disparition de pièces, le parquet général a considéré qu'il n'y avait aucun fait nouveau justifiant la réouverture de l'enquête. "Il apparaît en premier lieu que les analyses ADN ne pourraient en aucune façon faire l'objet d'une comparaison utile, dans la mesure où jamais personne n'a été mis en cause ou hors de cause dans ce dossier", précise le parquet général dans un communiqué.
Par ailleurs, les témoignages nouveaux avancés par l'avocat de la famille dans sa requête "ne le sont pas" ou sont "constitués de relations indirectes de propos très généraux tenus par des personnes décédées". Le parquet général considère que cette nouvelle requête constitue "une relecture personnelle du contexte politique de l'époque des faits" et non "une analyse objective de faits qui auraient été négligés par l'enquête".
Face à ce nouvel épisode dans une affaire où des pièces essentielles comme les scellés médicaux avaient disparu, l'avocat de Mme Boulin-Burgeat a indiqué qu'il allait dans un premier temps assigner l'Etat pour dysfonctionnement du service de la justice, avant de déposer une nouvelle plainte pour assassinat.
Le 30 octobre 1979, le corps de Robert Boulin, alors ministre du Travail de Valéry Giscard d'Estaing, avait été découvert dans un étang de la forêt de Rambouillet (Yvelines). Officiellement, le ministre gaulliste, pressenti pour devenir chef du gouvernement, se serait suicidé car il n'aurait pas supporté les révélations de la presse sur un terrain qu'il avait acheté à bas prix.
Refusant la thèse du suicide, la famille de Robert Boulin avait déposé une plainte pour homicide volontaire en 1983, soldée par un non-lieu, confirmée le 15 décembre 1992 par la Cour de cassation
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/societe/20100608.FAP3321/affaire-boulin-une-partie-du-dossier-disparu-rejet-de-la-demande-de-reouverture-d-enquete.html