Pourquoi les nanotubes entrent-ils si bien dans nos cellules ?Les nanotubes de carbone présentent des risques potentiels pour la santé, similaires à ceux des fibres d’amiante. Un groupe de chercheurs vient de comprendre comment et pourquoi de telles nanostructures pouvaient pénétrer dans les cellules. Une avancée pour la nanomédecine.
La vague des nanotechnologies est inévitable et c’est pourquoi il est important d’en évaluer toutes les retombées possibles, notamment au niveau de la santé. On sait que des nanotubes de carbone peuvent présenter dans certains cas des risques analogues à ceux de l’amiante. Il est donc important de connaître par quels mécanismes exacts nanofibres d’amiante et nanotubes réussissent à pénétrer dans les cellules alors qu’ils ne devraient pas.
Des chercheurs de la Brown University viennent d’apporter des éléments de réponse dans un article publié dans Nature Nanotechnology (donné en lien ci-dessous). À l’aide d’expériences et de simulations de dynamique moléculaire, ils sont arrivés à la conclusion que c’est en se faisant passer pour des nanoparticules de forme sphérique que fibres d’amiante et nanotubes de carbone forcent les défenses de la cellule.
On disposait déjà de modèles de biophysique expliquant comment et pourquoi des nanostructures de formes ellipsoïdale et sphérique traversaient la paroi des cellules mais dans le cas de structures unidimensionnelles, les phénomènes en jeu restaient incompris.
Éliminer des effets secondaires en nanomédecine
D’après les chercheurs, leurs travaux utilisant des nanotubes, des nanofils d'or, des cellules de foie de souris et des cellules mésothéliales humaines montrent que ces objets se présentent perpendiculairement à la surface des cellules dans 90 % des cas. Ce faisant, la forme arrondie de leurs sommets, d’un diamètre de 10 à 100 nanomètres, trompe la cellule qui réagit comme si elle était en présence d’une nanoparticule sphérique. Quelques minutes après le début de l’endocytose (absorption d'un corps étranger par la membrane cellulaire), la cellule détecte l'erreur et lance des signaux d’alerte qui se traduisent par une réaction inflammatoire. Mais il est trop tard.
En revanche, si le sommet arrondi d'un nanotube de carbone est coupé (ce qui signifie que le tube est ouvert et creux), le tube n’entre pas dans la cellule. Il s'agit là une propriété importante à connaître si l’on veut se servir de nanotubes de carbone pour certains traitements médicaux en nanomédecine, tout en éliminant certains effets indésirables.
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Pour en savoir plus, ci-dessous une explication sur les nanotubes :
Souvent présentés comme le matériau miracle du XXIième siècle, aux côtés de son cousin le graphène, les nanotubes de carbone pourraient être aussi dangereux que l’amiante... C’est la conclusion d'une équipe de chercheurs qui a démontré que ces nanotubes ressemblant aux fibres de l’amiante pouvaient causer comme elle des lésions pré-cancéreuses.
Découverts il y a une vingtaine d’années, les nanotubes de carbone sont des matériaux magiques aussi légers que le plastique mais plus résistants que l’acier dont les applications en électronique et plus généralement en nanotechnologie sont très prometteuses. Toutefois, les risques potentiels pour la santé de ces nanoparticules deviennent de plus en plus évidents et des recherches sont en cours pour éviter que l’Homme n’ouvre une fois de plus la boîte de Pandore.
Certains chercheurs ont remarqué que les longs nanotubes de carbone se présentent au microscope comme les fibres d’amiante dont les dangers pour la santé n’ont malheureusement été pris en compte que tardivement. En particulier, on sait que ces fibres sont la cause au bout de quelques dizaines d’années d’un type de cancer virulent, le mésothéliome. Il affecte le revêtement des poumons (la plèvre), de la cavité abdominale (le péritoine) ou l'enveloppe du cœur (le péricarde).
Le professeur Kenneth Donaldson, du Centre for Inflammation Research de l’université d’Edimbourg, a voulu en avoir le cœur net. Il a injecté dans les cavités abdominales de souris de longs nanotubes de carbone.
Le Dr Andrew Maynard montrant des amas de nanotubes de carbone. Crédit : Project on Emerging Nanotechnologies
Le résultat de ses études vient d’être publié dans Nature Nanotechnology et avec d’autres collègues comme Andrew Maynard, l’un des responsables du Project on Emerging Nanotechnologies, ils mettent en garde contre l’utilisation aveugle de ces nanotubes. Les chercheurs ont en effet constaté l’apparition de granulome chez les souris, des masses inflammatoires de petite taille dues à la prolifération dans un tissu d’un certain nombre de cellules dérivées des globules blancs. Dans le cas présent, ces derniers peuvent induirent à terme un mésothéliome.
Une solution : limiter la taille des nanotubes
Donaldson insiste sur le fait que cette observation n’implique pas que l’absorption de longs nanotubes de carbone induira des cancers. Mais de toute évidence des recherches supplémentaires sont nécessaires et la prudence est de mise.
Dans l’état, il semblerait que seuls des nanotubes longs de plus de 20 micromètres soient potentiellement dangereux. De plus, ces derniers ne sont généralement pas employés dans des conditions qui permettent de les inhaler. Mais les risques sont bel et bien là. Andrew Maynard fait remarquer qu’il connaît déjà douze produits sur le marché pour lesquels est explicitement mentionnée la présence de nanotubes de carbone, comme des raquettes de tennis et des éléments de vélos.
Mais pour lui, ce n’est probablement que le sommet de l’iceberg. Il recommande aux décideurs politiques et aux industriels de restreindre l'utilisation aux nanotubes de carbone courts et sous une forme rendant impossible leur inhalation, de préférence en inclusion dans des solides et des liquides et non pas en poudre.
Source : http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/physique-1/d/pourquoi-les-nanotubes-entrent-ils-si-bien-dans-nos-cellules_33484/