Histoire à plusieurs mains.

Sadia se réveilla.
Il était encore tôt, il faisait encore nuit dehors, mais elle savait que sa nuit était finie. Elle devait se lever, elle devait être au travail dans une heure. C’était dur. Elle arrivait péniblement à ouvrir les yeux, et elle voyait les minutes défiler sur l’affichage de son réveil. Chaque minute était un peu de temps grappillé avant de se lever.
Puis il fallut bien se lever. Sadia se traina jusqu'à sa cuisine. Elle arriva péniblement à remplir sa cafetière, et attendit dans un demi-sommeil qu’un jus noirâtre remplit sa tasse. Sa radio déblatérait des nouvelles qu’elle n’écoutait même pas. Sadia n’avait pas encore émergé. Le peu de ses neurones actifs était utilisé à la maitrise de sa tasse de café. Une sensation dans ses pieds la fit sursauter.
« _ Casse toi… Va bouffer, fais-moi pas chier… »
Grignette, son chat, venait de passer dans ses pieds. Sadia passa sa main sur son visage, toujours pas réveillée. Le chat, une grande minette noire, alla s’installer devant sa gamelle, et ne se fit pas prier pour manger. Sadia se servit alors une énième tasse.
« _ Faudrait pas que je picole autant, j’ai trop la tête dans le cul le matin… »
Elle descendit sa quatrième tasse d’une traite, et alla s’habiller. Elle ne chercha pas à se faire belle. De toute façon, ils étaient tous tout con à son boulot, puis ils la gonflaient. Un pantalon, un gros pull, ça ira bien. Elle mit seulement ses boucles d’oreille, qu’elle trainait depuis des années. Elle se regarda alors quelques secondes devant son miroir, rajusta ses cheveux, mais sans conviction, puis elle prit une veste et sortit de chez elle.

« _ Bbrrrrrrrrr"
Qu'il faisait froid ce matin d'octobre, Sadia pris la direction du métro, pas le choix de nos jours ça reste le moyen le plus rapide et le plus économique pour se déplacer en ville. Toujours avec la tête embrumée par la fête de la veille, elle marcha comme un automate, déjouant les dangers et évitant la foule, qui comme elle, fonçait vers son destin ...
Enfin l'entrée du métro, Sadia se retrouva stupéfaite devant la grille fermée, ou se trouvait une petite pancarte sur laquelle on pouvait lire "EN GREVE".
« _ Merde, c'est pas mon jour, la c'est sur je suis en retard."
Sadia reprit sa route, elle comprenait mieux l'agitation ambiante, la mauvaise humeur des gens, la multitude de cycliste qui défilaient dans tout les sens, les tapages et insultes des automobilistes, c'était une mauvaise journée en perspective.
Quel reportage lui avait on réservé au boulot, la rubrique des chiens écrasés ou la dernière fête de la maison de retraite, on ne l'aimait pas c'était sur, mais elle non plus ça équilibrait la balance...
Elle rêvait d'un grand reportage, qui pourrait changer le cours de sa vie, mais rien, le néant, Personne pour lui donner sa chance, pourtant Katia, sa copine a la section horoscope, lui avait annoncé un tournant dans sa vie, Sadia l'attendait toujours...

Un tantinet désabusée elle songeait à son avenir au sein de la rédaction de son journal. Allait-elle s'éterniser dans son placard, l'espoir de devenir grand reporter s'effilochait au fil du temps, prendre un virage décisif s'imposait maintenant. Elle se reconvertira à coup sûr en détective privé ! Mener des enquêtes sera plus captivant en comparaison de l'inertie liée à la rubrique nécrologique.
En entrant dans la salle de rédaction son esprit préoccupé ne put capter le silence pesant qui l'entourait. Soudain une voix l'interpella, la ramenant brusquement dans la réalité.
« _ Grouilles-toi Sadia !! Le vieux fulmine, il t'attend dans son bureau depuis un quart d'heure ! » S'égosilla Katia.
- Que se passe-t-il, où sont les autres ? Demanda-t-elle.
- La grève ! Ils se sont tous mis en grève !... C'est la pagaille.» Expliqua Katia avec une expression amusée. Près d'elle, Noël opinait de la tête, l'air soucieux.
- Bouges tes fesses ma belle ! Le Chef va t'incendier si tu traînes encore ! » Lui conseilla-t-elle énergiquement.
Ses deux collègues l'encouragèrent quand timidement elle voulut frapper à la porte du boss.
La voix de stentor de Lionel, le rédacteur en chef, la fit sursauter quand il lui intima l'ordre d'entrer...
Sadia ouvrir la bouche mais d'un geste bref Lionel coupa net, son élan à la justification de son retard.
Radoucit, il lui dit.
- "Tu vas prendre l'avion à destination de Toulouse dans 2 heures, Michael t'attendra dans l'aérogare. Votre mission consistera à jouer le rôle d'un couple marié, vous aurez affaire à des gens dangereux, capables du pire ! Luc notre correspondant chargé d'enquêter sur place ne donne plus de nouvelles depuis un mois. Sa famille, ses amis s'inquiètent de son absence, la police suppose, un enlèvement tragique. La collecte de renseignements sur ses contacts avant sa disparition s’avère incontournables pour le rechercher. Michaël n'a pas voulu délivrer certains détails aux inspecteurs, concernant l'investigation menée par Luc. La grève n'arrange rien, je n'ai personne sous la main mis à part toi qui serait capable d'assumer sans problème le rôle d'épouse. Je table sur ta perspicacité et le discernement de Michaël pour découvrir le pot-aux-roses ! »

Cela faisait maintenant plus de deux heures qu’elle poireautait dans le hall principal de l’aéroport et toujours pas de Michael.
Il lui avait pourtant confirmé, juste avant le décollage, il l’attendrait là.
Et elle faisait le piquet comme une cruche, tu parles d’un époux … s’impatientait t’elle.
Deux fois elle avait tenté en vain de le joindre sur son portable. Elle n’avait réussit qu’à laisser des messages sur sa boite vocale.
Décidément ils se foutent tous de moi dans cette rédaction !
Elle allait encore déclencher la touche bis de son portable quand une main fébrile se posa sur son épaule. Sadia sursauta effectuant un demi-tour sur les talons.
« _ Enfin depuis… » commença-t-elle.
Elle s’arrêta net.
Ce n’était pas Michael Elle ce trouvait face à un individu courbé, vêtu d’un manteau au col relevé, chapeau et grosses lunettes noires empêchant de discerner les traits de son visage. De plus, l’homme gardait la tête pointé vers le sol. ’’A croire qu’il compte les carreaux du hall ’’ pensa-t-elle en un éclair.
« _ Écoutez-moi ! » Ordonna l’inconnu.
« _ J’ai très peu de temps. Michael ne viendra pas. Débrouillez vous. Il vous contactera dès qu’il en aura la possibilité.»
Il lui prit la main et y glissa un papier avant qu’elle n’ait pu faire le moindre geste de recul.
L’homme avait fait un quart de tour prêt au départ lorsqu’il se ravisa. Il marqua un temps de réflexion et lâcha à mi-voix.
« _ Si j’étais vous je reprendrais le prochain avion pour Paris avant que vous ne finissiez comme les autres… »
Sadia n’eut pas le temps de broncher, l’homme avait déjà disparu comme un courant d’air. Ce qui contrastait vraiment avec la voix chevrotante et la main fébrile du vieillard qu’elle aurait juré avoir rencontré ???

Une invitation…
Le papier était une invitation, officielle, à une grande réception, au domicile de la Comtesse Irina Szczeskaya.
Sadia s’assit deux minutes sur un siège de la grande salle de l’aéroport. Szczeskaya… mais oui, ça lui disait quelque chose. Elle sortit son ordinateur portable de son sac et se mit à chercher. La Comtesse Szczeskaya, une grande figure d’Europe de l’Est. D’origine hongroise, elle était arrivée en France très jeune, orpheline, avec pour héritage son titre et la fortune de sa famille. Elle habitait un château vignoble au sud de la ville rose, où elle gérait ses affaires en maitre. Sadia fouillait un peu plus dans ce qu’elle pouvait trouver. La Comtesse Szczeskaya n’avait pas pour habitude de s’afficher ou d’étaler ses frasques dans la presse people. Elle était discrète, sobre, malgré sa fortune difficilement estimée, mais qu’on savait importante. Elle avait des intérêts un peu partout, ses affaires s’étendaient dans des entreprises diverses. Cela pouvait être dans la finance, l’industrie, le sport… Sadia se rendit très vite compte que cette femme avait une toile qui s’étendait largement sur diverses activités.
Soudain, Sadia tomba sur une photo de la Comtesse. Une grande femme, blonde, les cheveux raides, un visage fin, des yeux bleus profonds…
Son téléphone la sortit de ses lectures. Elle regarda l’écran... Katia…
« _ Qu’est ce qu’il y a ? »
« _ J’ai même pas eu le temps de te parler ce matin ma chérie ! Alors, ta soirée ? »
« _ Quoi ma soirée ? »
« Ben oui, hier, tu étais de sortie tu m‘as dit. Et alors ? »
Sadia voyait très bien où son amie voulait en venir.
« _ Je suis rentrée, pétée comme un coing, et j’ai dormi. »
Il y eu un blanc au téléphone. Sadia poussa un soupir d’exaspération.
« _ Quoi ! »
« _ Sadia, dois-je te rappeler les quatre étapes de la sortie en soirée ? »
Sadia se passa la main sur la tête. Sa copine était adorable, mais qu’est ce qu’elle pouvait être gonfle parfois !
« _ Je te rappelle Sadia. Etape un, tu bois. Etape deux, tu danses. Etape trois, tu allumes, qui tu veux, ce qui passe. Etape quatre, tu finis au pieu avec lui, ou elle, comme tu veux. »
Gna gna gna, gna gna gna. Sadia connaissait ce discours depuis des années. Surtout que Katia, elle, était assez adepte de passer directement à l’étape quatre sans s’encombrer de la phase d’approche.
« _ Et toi, tu en reste à l’étape un ! Il faut que tu fasses quelque chose Sadia ! Trouve-toi quelqu’un, je sais pas. Sors-toi de ton trou ! »
Sadia eut un sourire.
« _ Peut être… plus tard. Je ne suis pas encore prête à oublier… »
Sadia raccrocha. Puis elle regarda à nouveau la photo de la Comtesse, puis le carton d’invitation.

Anniversaire de Madame la Comtesse Irina de Szczeskaya. Madame la Comtesse vous invite chaleureusement à fêter avec elle ses quarante-six ans.

Quarante-six ans… Elle regarda à nouveau la photo de la Comtesse, déglutit, et espéra secrètement à être aussi bien conservée à quarante-six ans.
Il allait lui falloir une robe de soirée…

Une chose primordiale elle devait trouver un taxi, elle ne connaissait aucunement Toulouse donc trouver son hôtel et une robe n'allait pas être simple !!!
Elle se dirigea vers la sortie, d'un pas lent, elle repensa au vieil homme, a ce qu'il lui avait dit : "qu'elle finirait comme les autres..."
Sadia se posait des tas de questions, qu'était-il arrivé aux autres ? Un frisson la parcourut, elle sentait monter une légère angoisse, son instinct lui disait de fuir mais c'était sans compter sur son obstination. Elle irait jusqu'au bout de ce reportage, c'était sa chance !
Une fois dehors Sadia fit un tour d'horizon et monta dans le premier taxi de libre.
« _ Au grand hôtel de l’opéra, SVP »
Après une bonne demi-heure heure de trajet dans un silence de mort, elle arriva a ce fameux hôtel et la quelle surprise...
« _ (sifflement) ils ne se sont pas fichu de moi a la rédac, c'est un voyage de noce qu'on fait ? C'est pas vrai !!!! »
Un hôtel quatre étoiles majestueux se dressait la devant elle, au beau milieu de la grande place du capitole, le portier s'avançait déjà vers elle pour ses bagages !
« _ Mais qu'est ce que je fous la moi, tout ce luxe... »
Sadia entra par une magnifique porte tournante noire et or, elle se dirigea vers la réception, l'intérieur était encore plus somptueux !!!
Des lustres telle qu'on peut en voir dans les châteaux, des banquettes et des fauteuil en velours gris, des tentures de tissus précieux, elle entr'apercevait d'autres pièces toutes aussi joliment décorés, un salon, le bar...
Elle s'approcha de l'accueil, quand tout a coup...

Un homme grand et distingué l'aborda.
- Madame, je suis à vos ordres.
- Quoi ? S'étonna-t-elle. Qui êtes-vous ? »
- Vincent, Madame. J'appartiens à la Maison de Madame la Comtesse Irina Szczeskaya. Je suis majordome, mis à votre disposition le temps de votre séjour.
- Un valet ? Que ferai-je de vous ?
- Je vous seconderai Madame pour le choix de vos toilettes, l'accueil des visiteurs dans votre
suite... Je vous prodiguerai des conseils sur les usages dans le monde de Madame la Comtesse...

Après un instant d'hésitation elle accepta l'offre et l'invita à la suivre. En fait de suite Sadia occupait une magnifique chambre prolongée par un ravissant petit salon. Vincent s'activait à défaire son bagage en rangeant soigneusement ses effets, en attendant elle téléphona à son chef et lui narra les derniers évènements survenus depuis son arrivée... Il l'encouragea à poursuivre son rôle, elle avait carte blanche mais devait rester prudente, l'invitation de la Comtesse paraissait étrange à ses yeux.
Elle raccrocha et décida de sortir faire des emplettes en vue de la soirée accompagnée de Vincent.
En rentrant, épuisée par cette folle journée, elle prit un bon bain chaud et parfumé. Maintenant détendue, des questions envahissaient son esprit.
"Que cachait l'esquive de Michaël à l'aéroport ?
Un poseur ce gars, il l'horripilait !
Irina ? A quel jeu s'adonnait-elle ?
Perplexe face à ces mystères, Sadia refoula son inquiétude et passa dans sa chambre pour s'apprêter.
Peu après elle se contemplait dans la glace. Une robe de soie blanche enveloppait son corps de liane, de jolis escarpins chaussaient ses pieds, un voile évanescent couvrait ses épaules. Sa chevelure brune montée en un savant échafaudage mettait en valeur l'ovale de son visage. Un délicat maquillage s'harmonisait à son teint halé et à ses yeux mordorés.
Le prix en valait la peine estima-t-elle, la réputation de l'institut de beauté se confirmait. Satisfaite elle descendit. Une limousine l'attendait et la déposa devant l'hôtel particulier de la Comtesse.
Le faste de la salle de réception la laissa pantoise, un orchestre enchaînait des mélodies suaves et nauséeuses qui semblaient enchanter la foule d'invités. Des hommes d'un âge canonique engoncés dans leur tenue des grands soirs la reluquaient d'un œil lubrique en rêvant de scènes salaces dont elle était l'héroïne complètement nue et soumise. Ecœurée de leur lubricité, elle admit sans condition qu'ils représentaient les plus abominables -Tue l'Amour- qu'elle eu rencontré. Plus loin, de jeunes godelureaux pédants se pavanaient tels des paons courtisant sans complexe les invitées en grandes toilettes pompeuses. Ces dames scintillaient comme les arbres sur les Champs-Elysées un soir de Noël ! Celles-ci fraîchement liftées, couvertes de magnifiques joyaux minaudaient comme des chattes en chaleur.
Sadia vit une belle jeune femme souriante se dirigeant vers elle, la salua et aussitôt un échange agréable s'engagea avec Elisabeth qui se chargea de la présenter aux convives.
Insensiblement la mélodie fit place à une musique solennelle, tous les regards se tournèrent vers un grand escalier, en haut duquel apparut un couple. La Comtesse, une splendide créature moulée dans un sublime fourreau noir et parée d'une magnifique parure d'émeraudes tenait le bras d'un jeune dandy en smoking. Ils descendirent les marches sous les applaudissements.
Elisabeth pria Sadia de rejoindre leur hôtesse enchantée de faire sa connaissance. A quelques pas de là, son jeune cavalier subissait le flot de paroles ininterrompues d'une femme entre-deux âge à l'accent rocailleux. En gentleman accompli, il réussit sans peine à prendre congé de son interlocutrice, se fraya un passage parmi la foule et surgit près d'Irina en conversation avec ses deux invitées. Sadia jeta un rapide coup d'œil au nouveau venu...
- Michaël...!!? » Murmura-t-elle abasourdie. Indifférent, il ignora son trouble.

« _ Voici donc notre journaliste je suppose ? interrompit-il d’une voix haute et assurée semblant ne pas avoir entendu sa réaction. »
« _ Irina et moi-même sommes honorés qu’un journal de la capitale ait accepté de venir couvrir notre modeste réception. Grace à vous la création officielle de la Fondation Szczeskaya sera quelque peu mise en avant dans les médias à l’occasion de l’anniversaire de notre très chère hôtesse. »
Et d’un geste élégant et raffiné il lui baisa le revers de la main.
« _ Oui… balbutia-t-elle ne sachant plus que penser. »
Elle n’y comprenait plus rien et décida de se laisser porter par la situation.
Trente secondes plus tôt elle aurait juré que ce bel homme, bien mis et d’une élégance rare était Michael ! Pourtant un doute c’était installé. Elle ne l’avait croisé que quelques fois à la rédaction ; il ne travaillait pas sur les mêmes dossiers, les chiens écrasés ce n’était plus pour lui depuis longtemps. Michael était déjà une signature reconnue au journal et glorifiée par le boss.
Dans ses souvenirs l’homme était plus rustre. L’allure nonchalante, la démarche traînante, le verbe trivial et légèrement ventripotent … Rien à voir avec ce corps sculptural et ce physique fringuant !
Par quel miracle ?
Quelle fée l’avait ainsi métamorphosé ?
Car elle en était certaine c’était bien Michael qui ce tenait devant elle.
« _ La fondation Szczeskaya va modifier radicalement le paysage humanitaire et donner une véritable chance aux populations démunies. »
Il chercha du regard un geste d’approbation de la Comtesse. Celle-ci acquiesça d’un geste de tête et d’un sourire convenu.
Contrairement à son compagnon les discours ne semblaient pas être son fort. Certainement la raison pour laquelle Sadia avait trouvé si peu d’informations sur son hôtesse elle était d‘un naturel réservé.
« _ Mais ou est donc votre conjoint, il devait vous accompagner ? »Lâcha le bellâtre.
« _ Qui va faire les photos ? »
Répondre, ne pas ce laisser déstabiliser songeait Sadia.
Pourquoi Michael la mettait il ainsi au pied du mur, à quoi jouait il ?
« _ Un léger contre temps qui devrait s’arranger très rapidement, Il ne manquera pas un tel évènement. »
Elle avait insisté sur la seconde partie de sa phrase et plongeait son regard dans celui de son interlocuteur cherchant une réaction qui l’aurait à coup sûr trahi.
Mais rien ne transpira. Celui-ci semblait même prendre cet échange pour une avance. Elle avait souvent remarqué cette assurance dans le sourire de ses prétendants. Ces gros machos qui ce croient irrésistibles et qu’elle avait en horreur pour leurs présomptions.
« _ Je compte sur votre présence pour nous faire un bon article ! » Finit-il
Il prit le bras d’Irina et ce dirigèrent vers les autres invités.
Sadia se tourna vers Elisabeth.
« _ J’ai une absence … pouvez vous me rappeler qui est cet homme ? »
Elisabeth hésita posant une main sur sa bouche l’air gêné.
« _ C’est le nouvel ami de la comtesse, Michael. »
« _ Son amant ? » Osa directement Sadia devant le malaise de sa guide.
« _ Possible, depuis qu’Irina a fait sa connaissance ils sont inséparable, c’est lui qui a d’ailleurs mis cette idée de Fondation dans l‘esprit de Madame. »
Au ton de la voix d’Elisabeth, Sadia sentit qu’elle n’aimait pas beaucoup l’homme et ses idées.
Il n’y avait plus de doute c’était bien Michael.
Que faisait il la au bras de cette riche héritière et que venait faire cette histoire de fondation ?
On était bien loin de la disparition de Luc, que venait faire tout cela dans sa disparition ?

La soirée était déjà bien avancée.
Sadia s’était isolée sur la terrasse. Elisabeth l’avait abandonnée pour rejoindre d’autres connaissances. Elle essayait de tout remettre en place dans sa tête : Luc avait disparu, elle devait jouer un rôle de jeune mariée avec Michael, pour une mission en infiltration, il lui avait fait faux bond, et elle le retrouve dans une soirée, où elle était invitée, attendue, et où visiblement, on savait qui elle était et ce qu’elle faisait…
« _ Mademoiselle Dhamani. »
Sadia sursauta. La voix qui venait de l’interpeler sonnait comme du cristal, avec un fort accent slave. Elle n’eut pas besoin de se retourner pour savoir que c’était la Comtesse.
« _ Je suis très heureuse que vous ayez pu venir. »
La Comtesse s’avança sur la terrasse.
« _ J’avais moi aussi besoin de prendre l’air. Je commençais à étouffer à l’intérieur. »
Sadia s’était tournée vers Irina. La Comtesse avait un petit sourire aux lèvres. Ses yeux bleus métalliques semblaient dévisager Sadia, la sondaient, comme décortiquant le moindre détail. Il lui semblait qu’ils plongeaient au plus profond de son âme. Sadia se sentait écrasée par la présence et la beauté de la Comtesse. Elle eut subitement l’impression de ressembler à un vieux sac à coté d’Irina.
« _ Votre journal s’intéresse à ma jeune fondation, à ce que j’ai cru comprendre. »
Sadia essayait de ne pas se laisser démonter, mais le poids du regard d’Irina se faisait pesant.
« _ Oui… Je serai très intéressée… »
« _ Pas maintenant. »
Sadia se tut net, la voix de la Comtesse l’avait comme frappée à la poitrine. Irina tournait autour de Sadia, toujours en la regardant.
« _ Je suis fatiguée, et il y a trop de monde… »
Sadia n’osait pas bouger, elle sentait la Comtesse la frôler dans son dos. C’était comme une louve jaugeant sa proie, tournant autour, la regardant en coin. Sadia se sentait complètement sans défense, à la merci de cette femme qui pourtant, ne montrait aucune agressivité. C’était plutôt de la curiosité.
« _Venez demain ! »
La Comtesse venait de se planter devant le nez de Sadia, à dix centimètres de son visage. Cette dernière sursauta.
« _ A ma fondation, demain, pour le déjeuner. »
Irina approcha encore plus son visage de celui de Sadia, comme pour s’imprégner de son odeur, elle avait toujours son sourire de petite fille curieuse.
« _ Nous parlerons de ma fondation, et tout autre sujet qui vous intéressera… »
Elle se retourna brusquement, quitta la terrasse et laissa son invitée. Sadia poussa comme un soupir de soulagement. Cette rencontre avait été pour le moins surprenante, et inconfortable. Puis elle réalisa… Irina Szczeskaya, qui n’accorde jamais d’interview, venait de lui en offrir une, à elle ! Chez elle en plus, en tête à tête ! Il allait falloir préparer ça ! La nuit n’allait pas y suffire !
Sadia décida de rejoindre son hôtel de suite.

Prendre congé et s'en aller discrètement de ce lieux mondain, ce qui était une des choses que Sadia détestait le plus, tous ces précieux qui jacassent et se font des courbettes lui donnent la nausée, que des hypocrites songeât elle !!!
Rentrer a l'hôtel au plus vite devenait pour elle une question de survie, son monde était loin de toutes ces paillettes, en plus elle avait encore du boulot pour son rendez vous du lendemain, qui était déjà aujourd'hui .....
Sadia retourna a contre cœur a l'intérieur, chercha rapidement dans l'assemblé et y repéra Irina, on pouvait la reconnaître facilement entre tous, elle était tellement, comment dire... magnétique.
Sadia s'approcha :
« _ Pardon, madame la Comtesse... »
Irina se retourna et de son regard mystique Invita Sadia à se joindre a son groupe.
« _ Je tenais a vous remercier pour votre invitation et cette somptueuse soirée, mais ma journée a été longue et je souhaiterais rentrer a mon hôtel ! »
« _ Mais bien sur, je comprends, mon chauffeur va vous raccompagner, les rues ne sont pas sures à cette heure... »
« _ Merci. » Répondit Sadia, surprise et gênée à la fois.
Irina donna ses ordres à son chauffeur et tourna les talons, comme savent le faire les gens de son rang....
« _ Mademoiselle Dhamani... (un silence) à bientôt j'espère... »
Sadia suivi Igor le chauffeur de la Comtesse vers la limousine, ça faisait beaucoup pour une même journée, mais elle se laissa tomber sur les banquettes confortables et fit le point sur sa soirée.
Que sous-entendait ce "à bientôt j'espère" et pourquoi cette précaution et cette faveur envers elle ? Elle y penserait plus tard, Igor la raccompagna, elle allait bientôt pouvoir enlever cette robe trop "parfaite" et ces hauts talons, qui lui donnaient un mal au pied infernal et prendre un bain en réfléchissant à toute cette histoire.
Igor la déposa devant les portes de son hôtel, et attendit a sa grande surprise un sourire au coin des lèvres qu'elle soit a l'intérieur, un peu comme une mère qui surveille son enfants, Sadia sourit et pensa "quelle dévotion à son métier et à sa patronne tout de même !!!"
Elle prit sa clef et à sa grande surprise un paquet l'attendais dans son casier, qu'est ce que cela pouvait être, elle le glissa dans son sac, elle regarderait ça plus tard...
En arrivant à proximité de sa chambre Sadia fut surprise de voir sa porte entre ouverte et d'entendre du bruit a l'intérieur, pensant que c'était peut être Michael elle entra, mais eut seulement le temps de voir une ombre fondre sur elle, la percuter et s'enfuir...

Elle resta pétrifiée et suffoquée par l'agression et l'innommable sensation qu'elle ressentit au contact de l'intrus, qui se désintégra instantanément en une myriade d'étincelles. Les jambes flageolantes elle se dirigea tant bien que mal vers un fauteuil le plus proche, s'y pelotonna, l'esprit toujours confus. Une image hantait son esprit... -lorsque l'ombre avait fondu sur elle, son regard n’avait pas perçu un homme mais une sorte d'ombre grisâtre sans consistance semblait-il, pourtant elle avait ressenti un choc quand la chose l’avait bousculée violemment. A cette pensée un long frisson de dégoût 'a parcourut.
L'invraisemblance des évènements qui s'enchaînaient avec une telle rapidité, la laissait sans voix...
Un pur délire ! Estima-t-elle.
Lionel son rédacteur en chef l'avait avertie qu'ils devaient recueillir des infos sur les dernières activités de Luc, le reporter disparu, et qui était chargé d'éclaircir une affaire de corruption et de fraudes, dans laquelle trempaient des politiciens, des lobbys financiers et industriels.
En un mot le Gratin de l'Escroquerie, issu de l'Elite et de l'Aristocratie Française.
A ce stade là l'entreprise demeurait presque banale si ce n'est qu'actuellement toute logique avait disparue. L'incursion de l'être étrange dans sa chambre demeurait un mystère, l'absence de désordre la déroutait. Qu'y faisait-il ?
Revenant tout doucement à la réalité elle se leva, repéra sur sol près de l'entrée le petit colis lâché pendant la ruée. Elle l'ouvrit avec précaution car redoutant le pire... soulevant le coin d'une étoffe soyeuse elle découvrit un objet légèrement ovoïde de quatre ou cinq centimètres dont la matière ressemblait à s'y méprendre à du cristal noir. Nul indice n'apparaissait sur sa surface lisse. L'expéditeur avait négligé d'ajouter le mode d'emploi !
Une vague euphorie l'envahissait, une imperceptible vibration se répandit dans sa main refermée sur le cristal. Elle desserra son étreinte, une lumière noire émanant de l'objet pulsait doucement.
Graduellement son corps s'engourdissait, sa vue se troubla, prise de vertige elle tituba puis insensiblement le décor ambiant changea et fit place à un espace inconnu aménagé dans une immense géode de quartz noirs inondé de lumière noire.
Reprenant conscience elle bafouilla.
- Où... où suis-je...? Qu'est-ce...
- Sois la bienvenue Sadia ! Nous t'attendions ! N'aies crainte aucun mal ne te sera fait, précisa une voix venue de nulle part. Nous souhaitons éclaircir avec toi les derniers évènements survenus ces derniers jours. La connexion et l'harmonisation de tes ondes cérébrales avec celle du Nox (ou cristal) ont permit de te téléporter jusqu'ici. Auparavant le Nox avait détecté la présence de la créature qui cherchait à s'emparer de lui, afin d'assurer sa survie. Bloquée entre ton univers et le neuvième Inframonde cette dernière se savait condamnée à une fin dramatique. Se sentant prise au piège à ton entrée, elle a foncé vers la porte et la collision entre vous a instantanément déclenché sa dislocation.
- Le NEUVième... INFRAmonde... Jamais entendu parler ! Il sort d'où ce monde ? Et quelle idée d'aller se fourrer dans un truc pareil ! S'exclama-t-elle.
- Détrompes-toi ce niveau vibratoire est inoffensif, seul le manque d'apprentissage génère des interférences...
Inlassablement la voix poursuivait ses ahurissantes révélations...

Sadia se réveilla et d’un bond s’assit sur le lit…
Un rêve ? Ce ne pouvait être qu’un rêve d’ailleurs elle ne se souvenait déjà plus que de quelques flash de sa surprenante expédition nocturne, et pourtant…
Sa chambre d’hôtel était nimbée d’une douce lumière qui émanait des lampes de chevets posées de chaque coté du lit.
Elle jeta un rapide coup d’œil autour d’elle, craignant de voir resurgir quelques bizarreries dont elle venait semble-t-il de faire la désagréable expérience. Non rien, tout était calme et paisible.
Retrouvant un peu de calme, l’adrénaline retombant, elle senti une écrasante migraine lui tambouriner le crâne.
Elle n’avait pourtant pas abusé des boissons à la soirée ? Cela aurait pu expliquer ses mystérieuses expériences mais ce n’était pas le cas.
Il fallait qu’elle face le point. Depuis qu’elle était arrivée, trop de choses étranges lui étaient arrivé. D’abord le vieillard de la gare qui lui avait laissé une étrange impression. La Comtesse et son étrange regard au pouvoir pénétrant, on aurait pu croire qu’elle puisait directement dans votre esprit. Sadia se souvenait également d’avoir entrevu dans l’échancrure de son chemisier d’étranges tatouages. Enfin, la nuit avec son mystérieux visiteur et ce rêve vraiment trop réaliste d’un étrange univers ou elle avait été comme téléportée.
Michael qui se complaisait à présent dans ce nouvel univers de richesse avec ses strass et ses paillettes. A quoi pouvait-il bien jouer ?
Luc ...?
Toutes ces péripéties l’avait semble-t-il bien éloignée du but premier de son voyage. A cette pensé son regard fut inévitablement attiré vers le sol au fond de la chambre, prêt de la porte.
La boite !
Le petit colis de la veille était là. Elle se leva d’un bon. Son mal de crâne la ramena vite à plus de modération. Elle s’accroupit au coté et commença à soulever la douce étoffe… Le cristal avait disparu et la boite était vide. Sauf qu’en la ramassant, elle s’aperçu qu’un papier, une feuille de carnet arraché à la volé, était plié en quatre et coincé au fond.
Sadia le sortit et le déplia lentement.
C’était quelques notes rédigées d’une main maladroite. Elle remarqua immédiatement une signature au bas : Luc B.
Ce pouvait il que ce soit Luc qui lui ait fait parvenir le colis ?
Elle commença à lire les quelques mots griffonnés.


Luc était donc vivant ?
Était-ce bien lui qui la mettait ainsi en garde ?

On frappa à la porte, Sadia sursauta.
« _ Madame, c’est Vincent. Je dois vous conduire auprès de Madame la Comtesse. »
Sadia regarda l’heure : sept heure et demi ! Comment ça ? Mais elle n’était restée qu’à peine cinq minutes endormie, ou dans le cristal, enfin elle ne savait plus. Elle sauta sur ses pieds.
« _ Oui ! J’arrive ! Je… oui, je me dépêche ! »
La poisse, elle n’avait rien préparé. Tant pis, elle improviserait. Elle fonça dans la salle de bain pour se nettoyer un coup, histoire d’être un tantinet présentable. Elle se passa de l’eau sur la figure, fit tomber sa robe de soirée, prit un haut présentable et un pantalon et… poussa un grand cri d’effroi.
Là, dans la glace, elle se vit… et elle vit des tatouages, sur son corps. Une grande ligne de dessins remontant le long de son ventre, jusque sur sa poitrine, et une bande de dessins entourait aussi ses seins et son cou.
« _ Mais… mais… mais c’est… c’est pas vrai… c’est pas… possible… »
Elle était horrifiée. Comment ça avait pu arriver ? Qui avait fait ça ? Elle essaya de frotter, de faire partir ça… Rien n’y fit. Vincent tapa à la porte.
« _ Excusez moi de vous brusquer madame, mais il faut vous dépêcher. »
Tout s’embrouillait dans la tête de Sadia. Elle s’habilla rapidement, passa un foulard autour de son cou pour masquer le tatouage, et sortit.
Une voiture l’attendait en bas, Sadia n’était même pas en état de savoir de quelle couleur elle était. Elle gambergeait. Les évènements la dépassaient. Là, elle était à bout, elle n’en pouvait plus. En l’espace de deux jours, elle était passée d’une vie qui se résumait essentiellement à nourrir un chat, à une succession d’invraisemblances et d’incompréhensions. C’était trop pour elle.
Son esprit était tellement embrouillé, qu’elle ne se rendit même pas compte qu’elle était arrivée dans le jardin de la fondation Szczeskaya, au petit matin, avec la Comtesse face à elle.
« _ Mademoiselle Dhamani… »
Sadia sursauta, sortie brutalement de sa confusion. Irina la fixait. Elle était habillée simplement, une chemise sur une jupe droite et sage. Mais même aussi simplement affublée, elle rayonnait d’élégance.
Sadia tenta de se ressaisir et de remettre ses idées en place. Son esprit professionnel essayait de reprendre le dessus. Il y avait une interview à faire !
« _ Madame Sczceskaya… Je… Si vous voulez qu’on aille… »
Irina lui coupa la parole, en silence. La Comtesse avait la capacité d’immobiliser les gens d’un geste, d’un mouvement de la main. Elle s’avança vers Sadia, les yeux fermés. Elle s’approcha à quelques centimètres, comme la dernière fois, comme essayant de sentir son âme… Sadia était pétrifiée. Qu’est ce qui se passait encore… ?
La Comtesse ouvrit les yeux d’un coup. Elle attrapa Sadia par la main.
« _ Viens avec moi ! »
Elle l’entraina dans les jardins de la fondation, qui étaient un vaste domaine s’étendant autour d’un manoir réhabilité il y a quelques années par les soins de la Comtesse. Les deux femmes s’enfoncèrent dans un labyrinthe de lauriers, Irina entrainait une Sadia complètement désemparée, déboussolée. Les allées de verdure s’enchaînaient sans logique, sans distinction. Sadia suivait, le regard perdu, la Comtesse courait, et elle courait aussi, sans qu’elle ne tire sur sa main. Sadia suivait, soumise, elle ne contrôlait plus rien.
Les deux femmes s’arrêtèrent, dans une petite clairière au milieu des haies. Irina se retourna brusquement. Elle fixait toujours autant Sadia, sa curiosité n’était même plus masquée. Sadia essaya de l’ignorer.
« _ Madame la Comtesse, si... »
« _ Irina ! »
La voix de la Comtesse venait de claquer comme un ordre, son accent renforçant son autorité.
« _ C’est Irina ! »
Sadia déglutit.
« _ Irina, si vous voulez qu’on… »
« _ Tu es passée dans le Nox ! »
Là, c’était trop pour Sadia. Elle ne put pas réagir. La Comtesse gardait son sourire. Mais plus un sourire de curiosité, un sourire de compassion.
« _ Tu as vu l’autre coté… Tu es passée là-bas, je le sens… »
Sadia ne répondit que des larmes. Elle venait d’exploser, la tension accumulée était trop forte. Elle était pétrifiée par la peur, tout ça devait sortir, ses nerfs n’en pouvaient plus.
« _ Madame… Irina… »
La Comtesse posa son doigt sur les lèvres de Sadia, comme pour calmer ses sanglots. Puis doucement, elle dénoua le foulard autour du cou de la journaliste. Sadia se laissa faire, laissant apparaitre les marques qu’elle espérait ne plus voir. Irina les regarda, les yeux grands ouverts, presque impressionnée. Puis elle se recula, et défit un à un les boutons de sa chemise. Elle dévoila des dessins, tatoués autour de son cou, et sur sa poitrine. Sadia les regarda, pétrifiée. Elle reconnut les mêmes qu’elle avait sur son corps. La Comtesse eut un sourire amical.
«_ Il va falloir qu’on ait une discussion, toi et moi… »

Sadia ne comprenait pas ce qui lui arrivait, il fallait qu'elle se calme, reprendre ses esprits, analyser rapidement tous les évènements survenu jusque là...
Elle sursauta !!!! Irina venait de la saisir par les épaules et plongeait son regard dans le sien.
« _ Calme toi, respire profondément, fais le vide dans ta tête, respire, respire... »
Sadia obtempéra, à sa grande surprise, ses larmes cessèrent, et après quelques minutes elle s'était calmée, enfin elle allait pouvoir demander des explications a la Comtesse....
« _ Qu'est c..... »
« _ Que vois tu autour de toi ? » Lui lança la Comtesse avant même qu'elle puisse finir sa phrase...
Sadia fit un tour d'horizon, examina la situation et lança un regard énervé à Irina.
« _ Nous sommes seules, là au beau milieu du jardin de votre fondation ! »
« _ Rien d'autre ? »
Après un moment d'hésitation Sadia répondit.
« _ Dans un labyrinthe ! »
« _ Tout à fait, mais pas n'importe lequel, un labyrinthe de laurier, je vais te raconter ce qui t'arrive, mais pas ici ... »
Sadia prit la direction de la sortie, mais a sa grande surprise La Comtesse Irina prit la direction opposée, et s'immobilisa devant la haie centrale.
« _ Que faites-vous ? " l'interrogeât Sadia.
Irina un sourire mystérieux aux lèvres, la regarda avec douceur, on sentait émaner d’elle une grande sagesse. Elle tenait dans les mains deux feuilles de lauriers, et lui en tendit une. Sadia la prit dans ses mains, perplexe, mais à quoi donc cela pouvait bien lui servir ???
« _ Nous devons aller dans un endroit sacré, afin d'être tranquilles. »
« _ Mais ici ... »
Irina l'interrompit et lui expliqua la valeur du laurier. C'était une plante divine, assimilée à l'immortalité, les pythies de Delphes l'utilisaient pour la divination, le labyrinthe était aussi sacré mais ne pouvait pas protéger à lui seul leur entrevue. Elle porta la feuille de laurier à sa bouche et la mangea avec soin, elle fit signe a Sadia de l'imiter....
Que devait-elle faire ? Suivre les instructions de la Comtesse ou fuir ? Un frisson monta le long de sa colonne vertébrale et après une courte hésitation, elle porta la feuille à sa bouche et tomba dans un autre temps.
Sadia sentit sa tête tourner, puis une chaleur inexplicable monta en elle, une sensation de légèreté et subitement, elle fut happée par une force invisible, et se retrouva dans un lieu inconnu.
« _ Bienvenue dans le sanctuaire » lui dit Irina d'une voix douce qu'elle n'avait encore jamais entendue...

Un majestueux chêne millénaire abritait sous ses branches un autel taillé avec raffinement dans un marbre blanc avec de chaque côté deux vasques en colonnes, desquelles s'élevaient des fumigations. Derrière, l'imposante statue d'un dieu mi-homme mi-cervidé protégeait le lieu sacré entouré de pierres levées sur lesquelles on distinguait des signes profondément gravés. Près de là des femmes et des hommes s'activaient à la préparation d'un banquet.
Ebahie, Sadia s'évertuait à comprendre où elle se trouvait. Insensiblement ses jambes se dérobèrent. La voyant vaciller Irina se précipita pour la soutenir.
- C'est... un rêve... Je vais... me... ré..vei..ller », murmura-t-elle avant de sombrer dans l'inconscience.
Un parfum vivifiant la ramena rapidement à la réalité. La Comtesse, un petit flacon très odorant à la main, tentait de la rassurer.
« _ Ne t'inquiètes pas, nous sommes dans le monde originel des Wiccas. Viens un peu te reposer dans ma cabane, tu reprendras des forces.
Lentement elles en prirent le chemin, une jeune femme la soutenait. Sur le seuil Sadia prit le temps d'admirer la féerie du site.
Trois jeunes filles s'empressèrent de leur présenter de petites bouchées sucrées, arrosées d'un excellent thé.
La maîtresse des lieux prit plaisir à lui raconter l'histoire des Wiccas et son appartenance à la confrérie. Détendue Sadia buvait ses paroles... Jugeant le moment opportun, Irina avoua avoir senti dès leur première rencontre qu'elle possédait tous les atouts pour devenir une véritable Wiccane. Qu'en pensait-elle ? Le voulait-elle ?
Subjuguée, elle acquiesça sans plus réfléchir.
Aussitôt une nuée de vestales envahit la maisonnette.
- L'initiation commence par une purification, elles vont prendre soin de s'en charger, déclara Irina.
Au bord du bassin, on la déshabilla, deux wiccanes l'aidèrent à descendre les marches. Des effluves fruitées montaient de l'eau du bain, ravie elle éprouva de la délectation à se laisser purifier.
Ensuite on la sécha, on la massa avec des huiles essentielles, puis elle enfila une longue robe blanche et fut invitée à se rendre sous le chêne.
Lentement le jour faisait place à la nuit. Des lanternes allumées se balançaient aux branches. Près de l'arbre un attroupement attendait la suite de la cérémonie. Des flambeaux illuminaient le sanctuaire. Devant l'autel la Comtesse en Grande Prêtresse versait dans un calice d'or un liquide bleuté, derrière celui-ci un étrange miroir noir reflétait la Lune, émue Sadia s'approcha.
Une vingtaine de Wiccanes autour d'elles entonnèrent un chant mélodieux à la gloire de leur Dieu cornu, en esquissant de gracieux pas de danse. Irina la coiffa d'une couronne de fleurs.
L'allégresse envahissait les participants qui unirent leurs voix à celles des Prêtresses, puis le silence se fit lorsque la Comtesse eut saisi la coupe et la lui présenta. Sadia but le breuvage, geste qui la liait à leur Dieu et à la congrégation.
La Grande Prêtresse signifia la fin de l'office et s'éloigna. Un léger sifflement emplit l'espace et brusquement s'abattit sur la nouvelle recrue un cylindre translucide. La drogue avalée quelques instants plus tôt la priva de réaction. Cependant son esprit toujours conscient tentait de lutter contre la paralysie qui se propageait dans son corps. Des éclairs d'une très grande intensité fusèrent de toute part pénétrant jusqu'au tréfonds de son être. Affolée par l'insupportable douleur elle hurla... Mais aucun son ne sortit de sa bouche.

- Irina a bien mordu à l'hameçon le sondage mental est lancé, annonça Haal.
- Résistera-t-elle ? S'enquit Noo.
- Le souvenir écran a été parfaitement élaboré et intégré dans sa mémoire par Maître Inoué...
- Je n'en doute pas, toutefois le sort de Sadia m'inquiète...
- Tranquillises-toi. Je m'en charge. Dans une seconde elle ne souffrira plus. La Comtesse ne se risquera pas à la détruire persuadée de tenir entre ses mains le plus sûr moyen de s'emparer d'un Nox !
Les deux veilleurs poursuivirent leur étroite surveillance, rassurés de la tournure des évènements.

Sadia resta encore un moment sous l’emprise du breuvage que lui avait fait boire Irina, maintenue debout par le cylindre qui l’entoure, mais ne pouvant faire aucun mouvement.
Suite aux dernières paroles de l’incantation de la grande prêtresse, celui-ci disparut, libérant Sadia, qui immédiatement s’écroula sur le sol.
Haal et Noo restaient à l’affût du moindre moment ou ils pourraient intervenir.
Irina s’aperçut que Sadia était tombée, elle donna aussitôt des ordres pour qu’elle soit conduite à sa cabane le temps de retrouver ses esprits.
Deux adepte, la prirent délicatement dans leurs bras puis suivirent Sofia, la servante d’Irina, qui lui était dévouée corps et âme. Arrivés a la cabane, ils déposèrent Sadia sur le lit et sortirent en la laissant en compagnie de Sofia. Celle-ci lui passa un linge humide sur le visage avec une grande douceur et attention.
Pendant ce temps la grande prêtresse s’adressa à tous les adeptes, qui formaient un cercle autour d’elle.
« _ Dans un très proche avenir nous allons pouvoir trouver le neuvième inframonde dont je vous parle depuis bien des années. Ce qui va nous permettre d’obtenir un grand pouvoir psychologique, spirituel et physique. Enfin notre dieu Cornu va nous revenir et nous guider. »
Toutes et tous s’inclinèrent devant Irina. Au bout de quelques minutes, les adeptes se relevèrent et se dispersèrent. Michael s’approcha de la grande prêtresse, lui tendit le bras et l’accompagna à la cabane ou se trouvait Sadia encore inconsciente. Ils entrèrent, rejoignirent Sofia. Ils s’enquirent de comment allait la jeune journaliste. Sofia les informa qu’elle était toujours inconsciente, qu’il allait falloir du temps pour qu’elle récupère.
Irina lui dit de rester à son chevet jusqu'à ce qu’elle reprenne ses esprits. Ils sortirent de la petite chambrée et allèrent se changer dans une pièce avoisinante.
Michael s’approcha de la Comtesse, l’enlaça doucement et l’embrassa avec une grande tendresse. En la tenant dans ses bras, il la félicita pour cette grande cérémonie qui venait d’avoir lieu. Au moment où celui-ci se rapprocha à nouveau, Irina passa ses bras autour de son cou. Elle tourna la bague qui était à son majeur, manipula un petit fermoir qui se trouvait sous la pierre. De la sortit une minuscule aiguille qu’elle appliqua directement sur la nuque de Michael.

« _ Qu’est ce qui se passe !!? »
L’image venait de disparaître. Hall tenta de rétablir le contact, mais sans succès.
« _ Zut, Michael a du se faire griller ! »
Dans la cabane, Irina regarda Michael s’écrouler à ses pieds, un sourire agacé aux lèvres.
« _ Je déteste qu’on cherche à me manipuler… »
Elle referma sa bague, ne quittant pas des yeux le corps pris de soubresauts devant elle. La Comtesse fut soudainement sortie de ses pensées par de grands cris.
« _ Un intrus ! Il y a un intrus dans le sanctuaire ! »
Elle tourna la tête d’un coup, et fonça vers la pièce voisine. Elle eut à peine le temps de voir Sofia étendue au sol, qu’elle reçu un grand coup sur la tête. Elle tomba à terre, un deuxième coup tout aussi violent suivit. Derrière, Sadia émergeait.
« _ Uuuuhhh… qué n’y a… ? »
On la prit et on l’assit brutalement.
« _ Sadia ! Sadia tu dois te lever ! Réveille-toi Sadia ! »
« _ Grignette… tu fais chier… je t’ai donné à manger… »
« _ Sadia merde réveille toi ! On doit partir ! »
Sadia ouvrit les yeux. Elle vit… Luc. Il était recouvert d’une cape et d’une capuche, mais elle devina des traits meurtris, marqués, comme si une profonde fatigue et le temps l’avait affecté. Et pourtant c’était lui, Luc, et il semblait effrayé.
« _ Je dois te sortir de là, dépêche toi lève toi ! »
Sadia obéit, encore un peu groggy. Elle regarda autour d’elle. Elle vit une femme au sol, Sofia, visiblement assommée, et derrière, elle vit Irina, qui se relevait. Luc se retourna d’un coup et frappa la Comtesse au visage à l’aide d’une grande barre de fer. Elle retomba à terre, il cogna alors encore plus fort, poussant de grands cris hargneux à chaque coup. Sadia sursautait chaque fois qu’il frappait, terrifiée. Elle entendait les os d’Irina craquer sous les coups. Luc l’attrapa alors par le bras.
« _ Viens ! On doit fuir ! »
« _ Mais… mais… »
Sadia ne pouvait pas quitter des yeux la Comtesse à terre, baignant dans son sang.
« _ Mais viens ! Il faut fuir avant qu’elle ne se relève ! »
Sadia regarda Luc l’air éberluée.
« _ Qu’elle se… Comment ça qu’elle… ? »
« _ Suis moi je te dis ! »
Et alors, Sadia vit la Comtesse bouger. Ses mains se posèrent au sol, elle se mit sur ses genoux. Doucement, elle se redressait sur ses pieds. Elle releva la tête, les yeux fermés. Ses blessures au visage se refermaient doucement, on entendait le cliquetis des ses os qui se remettaient en place, Luc et Sadia regardaient la scène horrifiés. Irina souriait, elle tourna la tête vers eux et ouvrit les yeux, lançant un regard brulant, alors que ses dernières blessures disparaissaient.
« _ J’ai presque eu mal… »
Luc tira brutalement Sadia par le bras, tellement elle était incapable du moindre mouvement. Ils sortirent en courant de la cabane, bousculant tout sur leur passage.
« _ Cours ! Je sais où on peut sortir ! »
Ils couraient le plus vite possible, Luc frappait tout ce qui s’approchait trop près d’eux. Irina parut soudainement à la porte de la cabane. Elle hurla.
« _ Sadia ! »
Sadia s’arrêta brutalement et se retourna vers la Comtesse.
« _ Ecoute moi Sadia ! Ne t’enfuis pas ! »
Luc tirait sur le bras de Sadia, mais elle ne pouvait pas s’empêcher d’écouter.
« _ Tu es des nôtres Sadia ! Tu es notre sœur ! Ne t’enfuis pas ! Aucun mal ne te sera fait, crois moi… »
Sadia ne comprenait pas. Elle avait peur, mais la voix de la Comtesse la rassurait. Dans toute cette confusion, elle ne savait pas pourquoi, mais elle se sentait presque en sécurité auprès de la Comtesse. Irina prit une voix plus douce, et son visage parut triste.
« _ Reste Sadia, je t’en prie, ne me laisse pas… »
Luc de laissa pas le temps à Sadia de se poser la question, il la tira par le bras plus fort et ils s’enfoncèrent dans les bois.
Quelques minutes plus tard, ils réapparurent dans le labyrinthe de haies de la fondation. Sadia était complètement perdue. Luc la tenait toujours par la main.
« _ On doit filer d’ici, on n’est pas encore en sécurité ! »
« _ Non ! »
Sadia hurlait.
« _ Qu’est ce qui s’est passé ? Pourquoi… comment elle a fait ça… elle… s’est guérie… ? Et toi, où tu étais ? Et où j’étais moi ! »
Luc attrapa Sadia par les épaules.
« _ C’est pas le moment ! On doit foutre le camp d’ici ! »
« _ Non je veux pas ! Je veux que tu me dises ! »
Luc soupira.
« _ Ecoute, tu étais sous la fondation, tu as subit un rituel d’intronisation, et Szczeskaya s’est auto-guérie parce qu’elle a du sang de démon dans les veines ! C’est bon, on peut y aller ? Ou tu comptes retourner là-bas ? »
Sadia regarda Luc terrifiée, il la prit par la main et ils se remirent à courir. Ils quittèrent la fondation le plus vite qu’ils purent.

Luc la conduisit dans un lieu sûr, une vielle église à première vue, Sadia était paniquée, terrorisée et totalement perdue, il lui fallait récupérer !

Apres quelques heures de repos, Sadia entreprit de faire le tour des lieux, Luc était assoupi sur une chaise près d'elle...
Cette chapelle était des plus obscure, comme sans fenêtre, les statues étaient assez différentes de celles traditionnellement observées dans les églises catholiques.
L'une d'entre elles attira son attention. C'était une magnifique représentation de femme, habillée de vêtements clairs et légers, telle une nymphe, qui laissait entrevoir les parfaites formes de sa féminité. Sadia fit un tour rapide des autres statues, toutes avaient un air pas commun, voire même féérique, tels des êtres parfaits. Mais sont esprits fut ramené vers la première, comme si celle-ci l'appelait.
Elle décida de la contourner et quelle ne fut pas sa surprise quand elle découvrit une inscription, sur l'arrière. Des symboles, identiques à ceux imprimés sur son corps, elle s'approcha, autre chose était écrit :


Mais, il manquait la fin de l'inscription !!!
Sadia n'entendit pas Luc approcher...
-« _ Superbe, non ? »
Elle sursauta et bredouilla.
-« _ Oui..., superbe mais étrange ! Toute cette histoire est un cauchemar, ou sommes nous ? Que ce passe t il ? »
« _ Nous sommes dans un sanctuaire celtique transformé au premier siècle en chapelle de sous terre, depuis bien longtemps laissé à l'abandon, sauf pour quelques sociétés secrètes qui perpétuent ces croyances. »
-« _ Qu’est ce que j'ai à voir dans tout ca ? » demanda Sadia.
Luc allait commencer son explication quand une ombre apparut dans une alcôve, il approchait. Sadia connaissait cette silhouette, c'était.... c'était ... l'homme de l'aéroport !!!!!

L'attitude distraite de son vis à vis éveilla la curiosité de Luc qui se retourna légèrement, un
mendiant se dirigeait vers eux. Une pulsion meurtrière l'envahit subitement, tel une furie il se
précipita sur le vieil homme.
- Enfoiré ! Rugit-il, en décochant un superbe uppercut dans le foie du vieillard qui se plia en deux sous le choc, suivit d'un bon crochet du droit qui le cueillit au menton. Histoire de redresser la situation ! S'exclama furieux le reporter. Que penses-tu aussi de celui-ci ! » Marmonna-t-il entre ses dents serrés. L'agressé s'écroula K.O à ses pieds.
- Es-tu devenu fou ? Gronda Sadia. Tu l'as mis dans un sale état le pauvre vieux !
- Le pauvre vieux... Le pauvre vieux... Une ordure oui ! Ce vioque !
- Que va-t-on en faire ?
- On va l'immobiliser...
- L'immobiliser ? Il ne peut pas être plus immobile ! Tu l'as tellement rossé qu'il aura du mal à émerger avant longtemps !
- Te fies pas aux apparences, c'est un roc ! Surveilles-le, je vais voir si je peux dénicher de quoi l'attacher.
Il s'éloigna rapidement, fit le tour des lieux. Déçu, il s'engagea le long d'un couloir débouchant sur la nef. Pendant son absence la jeune femme compatissante se pencha vers le gisant, et l'examina. Un moment plus tard, Luc la retrouva agenouillée près du blessé. Sans ménagement il fit rouler le corps inerte sur le flan, d'une chiquenaude du pied l'homme bascula face contre terre. Luc s'employa à le ligoter fermement aux poignets et aux chevilles avec une bande d'étoffe usée.
- Pauvre vieille chose ! S'apitoya-t-elle.
- Tu rigoles j'espère ! Ce mec est un traitre ! Ses conseils véreux m’ont fait tomber entre les griffes d'Irina ! Il est de mèche avec cette sorcière ! Ces dernières semaines je les ai passées dans un sordide cachot obscur, affamé, privé de sommeil ! On m'en sortait les jours où l'on m'envoyait dans ce foutu cylindre. Hier, profitant d'une pagaille incroyable parmi les sentinelles de la Comtesse, je me suis enfui en douce. Le soir venu, caché, j'assistai à ton départ pour la soirée mondaine de la Szczeskaya, et aujourd'hui lorsque tu l’as retrouvée, je planquais au milieu des lauriers. Passer dans le sanctuaire ne fut pas une mince affaire. Après maintes tentatives, j’ai résolu enfin le problème et surgi....
- Pas tout à fait Luc ! L'interrompit le mendiant redevenu soudain guilleret.
- La ferme ! Tu l'ouvres si on te le permet ! Cracha-t-il en se tournant vers le revenant.
- Calmes-toi, conseilla Sadia en lui prenant le bras, écoutons ce qu'il veut nous dire, son comportement me laisse perplexe, il paraît vouloir nous fourvoyer, cependant son arrivée ici prouverait le contraire.
Médusé d'entendre des arguments aussi évidents, le jeune homme apaisé, le questionna. - Qui es-tu ? Ton déguisement ne trompe personne ! Aboya-t-il, persuadé d'avoir raison.
Un sourire ironique éclaira le visage du vieil homme.
- Il se fiche de nous ! Lança Luc, la voix vibrante de colère.
Tout à coup devant leurs yeux ébahis, ses traits se transformèrent en une figure connue, celle de...
- Michael !! S'écrièrent-ils ensemble. Mais... Tu es mort ! Irina t'as empoisonné ! Dirent-ils en cœur, émus.
La tête de leur ami se déforma encore et laissa place à celle d'un inconnu.
- Tu bug grave mec ! Plaisanta Luc. Ta connexion laisse à désirer.
- Détrompes-toi ! Répliqua le supposé Michael. Ceci est ma vraie personnalité, je suis maître Inoué originaire d'un monde parallèle à la Terre.
- Je reconnais votre voix, s'enthousiasma la jeune femme. Vous m'avez accueillie dans la salle aux cristaux noirs ! Libère-le, immédiatement Luc !
- Ne rêve pas ma belle ! Il nous doit des éclaircissements sur ses agissements très douteux !
- Présentement, je venais clarifier vos mésaventures. Ton enlèvement Luc a servi à brouiller les pistes et a égaré l'esprit de la Comtesse et aussi à t'attirer ici Sadia. Pourrez-vous nous pardonnez un jour de vos souffrances ? Demanda l'étranger.
- Mon peuple à la charge de protéger le Neuvième Inframonde contre l'intrusion inopinée d'êtres vils et avides de pouvoir à l'instar d'Irina...

Sadia, qui est loin de tous comprendre, se mit à hurler (silence) pour stopper la discussion entre Luc et maître Inoué, puis se mit a penser à haute voix.

Alors si je résume ce que vous venez de dire et que j’ai entendu.
La comtesse Irina veut pouvoir atteindre le neuvième inframonde par tous les moyens !!!
Le vieil homme qui est venu me chercher à la gare est Michael mais aussi l’ami de la comtesse ainsi que Maître Inoué. Cela fait beaucoup personnalités bien différentes. Et toi Luc tu as été enlevé, ce qui avait pour but de déstabiliser celle-ci. Mais par qui cela reste encore un mystère. Vous, maître Inoué, vous êtes le gardien du passage du neuvième inframonde. C’est bien exact ???
Mais qu’est ce que je viens faire au beau milieu de tout cela ? Alors que je viens pour rédiger un article sur une fondation.

De nouveau, un grand silence ce fit dans la chapelle. Soudain à l’extérieur, du bruit se fit entendre. De nombreuses voix faisaient du tapage, alors Luc libéra les jambes qu’il avait entravées.
Maître Inoué dit à voix basse à Luc :

Vas derrière l’autel de pierre, regarde sur le coté droit de celui-ci. Tu va trouver une petite aspérité de couleur bleutée. Appuis dessus, recule de quelques pas puis patiente trente secondes.

Luc posa un regard interrogateur en direction de son interlocuteur. Qui lui fit comprendre que ce n’était pas le moment des explications, qu’ils devaient disparaître immédiatement. Il s’exécuta rapidement, sans un bruit.
Au moment où il fit le dernier pas en arrière comme il lui avait été conseillé, une grosse dalle se mit à se décaler vers la gauche. Le plus étonnant, pas un frottement ne se laissa percevoir.
Il put se rendre compte qu’un escalier de plusieurs mètres apparut.
Luc revint auprès de son captif, le détacha, puis fit signe à Sadia de passer à la suite de Maître Inoué.
Tous trois s’engloutirent et descendirent les premières marches. Entre-temps, Luc pensa à se munir d’une torche pour avoir de l’éclairage. Le dernier, disparaissant dans les entrailles de ce sous-terrain la dalle reprit sa place tout aussi silencieusement.
Une fois que la dalle eut complètement recouvert l’entré, maître Inoué se retourna vers Luc et lui montra du doigt un flambeau contre le mur. Celui-ci approcha la torche du flambeau et mit la flamme contre.
D’un seul coup, tous les flambeaux s’allumèrent en même temps, laissant apparaître un long couloir large. Au dessus de leurs têtes, ils pouvaient encore entendre les voies des adeptes de la Comtesse qui les cherchaient. Après avoir parcouru plusieurs dizaines de mètres, maîtres Inoué stoppa la progression, se retourna vers Luc, en le regardant dans le profond des yeux et lui dit :
« _ Je ne suis pas ton ennemi, bien au contraire. Mais cela pour t’en apercevras par toi-même, tu as encore beaucoup à apprendre sur notre univers et notre monde, mais cela sera pour plus tard. Il nous faut nous mettre à l’ abri, suivez moi !!! »

Le couloir n’était pas très long, tout au plus deux cents mètres, et se finissait par un mur. Inoué fit un signe sur une pierre et une dalle s’écarta. Derrière, Sadia et Luc découvrirent une salle, comme une grotte creusée dans le roc. Il n’y avait pas de meuble, tout juste des affaires posées au sol ou sur des pierres, comme un campement. Sur les murs, on pouvait voir une image, projetée, comme dans un cinéma. Les autres murs rayonnaient d’une lumière douce, tamisée. Deux personnes se tenaient là. Deux hommes, en apparence plus jeunes qu’Inoué. L’un d’eux se retourna.
« _ Maitre Inoué, vous voilà. »
« _ Noo, Hall, nous avons des invités. »
Sadia et Luc entrèrent, Sadia fit un petit signe de la main.
« _ Euh… salut… »
Hall et Noo n’avaient rien d’êtres surnaturels. Habillés de vêtements conventionnels, l’aspect dépenaillé, les visages mal rasés, on sentait qu’ils venaient de passer plusieurs jours sous la terre sans bouger de leur cachette. Hall finit sa cigarette.
« _ C’était une bonne idée de l’amener celui là ? »
Il montrait Luc, qui était déjà assez énervé pour ne pas apprécier la remarque.
« _ Nous lui devons des explications Hall. Venez, installez-vous. »
Plusieurs rochers ici ou là servirent de siège. Luc était méfiant. Sadia, elle, se sentait plus curieuse qu’effrayée. C’est elle qui attaqua.
« _ Pourquoi vous avez le visage de Michael ? »
Inoué sourit.
« _ Parce que je me suis incarné en lui. »
Sadia haussa les épaules.
« _ Ah ben oui, c’est tout simple ! »
« _ Tous les trois, nous sommes incarnés. Nous n’avons pas d’existence matérielle. Tu as pu t’en rendre compte Sadia, lorsque tu étais dans notre monde. »
« _ Mais… c'est-à-dire qu’il est là, Michael ? Là … dedans ? »
« _ Oui, il est là. Je le laisserai quand je repartirais chez moi. »
Inoué marchait dans la pièce.
« _ Notre rôle est d’empêcher toute intrusion dans notre monde, le Neuvième Inframonde. »
Luc l’interrompit.
« _ Pourquoi le neuvième ? »
Ce fut Hall qui répondit.
« _ Parce que les huit autres ont été détruits. »
Inoué reprit la parole.
« _ Cela est une autre histoire, qui remonte à il y a longtemps… Mais cela n’est point le propos actuellement. Nous sommes trois à avoir été envoyés ici, pour éviter qu’Irina Szczeskaya arrive à ses fins. »
« _ C'est-à-dire ? »
« _ Envahir notre monde… »
Là, Noo prit le relai.
« _ Szczeskaya a trouvé un Nox il y a plusieurs années de cela. Elle a perçu notre monde, tout comme toi Sadia. Depuis, elle ne rêve que d’y retourner. Sa fondation n’est qu’une façade pour des recherches sur les mondes parallèles, et les portails pour y parvenir. Elle a presque réussi, il y a peu. Une brèche a été ouverte dans notre monde, qui a libéré un de nos frères, et un autre Nox s’est matérialisé sur cette Terre. »
« _ Celui que j’ai volé ici… »
« _ Exact Luc. Notre frère a essayé de le récupérer. Mais sans corps matériel, il s’est vite épuisé. »
Inoué regarda Sadia.
« _ Il s’est évaporé devant toi. »
Sadia sursauta.
« _ C’était… L’ombre noire ! La fumée, c’était ça ? »
« _ Exact. Dans un dernier relent d’énergie, il essaya de protéger le Nox. »
Sadia regardait le sol, marmonnant, faisant des signes avec ses doigts, comme si enfin, les choses s’assemblaient dans sa tête. Puis elle continua.
« _ Mais… et il est où ce Nox maintenant ? »
« _ En toi. »
Sadia passa instinctivement sa main sur son cou, sur les tatouages.
« _ Voilà pourquoi Szczeskaya s’intéresse autant à toi. Tu es la seule, avec elle, à posséder ce lien avec le Neuvième Inframonde. On avait réussi à lui faire croire que c’était le cas aussi pour Luc, pour observer comment elle comptait s’y prendre. »
Luc faillit se lever pour protester, mais Sadia le rassit de suite. Elle voulait en entendre plus.
« _ On a compris. Elle utilise le tube pour essayer de sortir l’essence du Nox, pour l’utiliser dans une machine, pour ouvrir une porte. Elle utilise d’ailleurs ce tube sur elle-même. »
Sadia déglutit en se remémorant le tube. Et Irina y allait de son plein grès… Inoué se tourna vers Luc.
« _ Je m’excuse encore de t’avoir fait subir tout cela. Mais il était primordial que nous puissions comprendre comment ce système fonctionnait. »
Hall se ralluma une cigarette.
« _ Cette machine utilise à la fois une force électromagnétique et un pouvoir mystique. Mais on ne sait pas encore exactement comment ça marche. C’est vraiment très complexe, et cela utilise des pouvoirs que nous ne maitrisons pas. »
Sadia regardait le sable sur le sol, en silence. Les pièces du puzzle s’assemblaient. Toutes ces révélations, bien qu’inquiétantes, la réconfortaient un peu. Enfin, elle comprenait. Pas tout, mais un petit quelque chose.
« _ Et moi… alors… ? »
« _ Toi Sadia, il va falloir qu’on te cache. Szczeskaya ne doit pas te retrouver. Elle est mauvaise, tu es en danger. »
Sadia regardait toujours le sol, l’air songeur. Elle dessinait avec son doigt dans le sable. Elle fit une tête, ronde, avec de longs cheveux raides, deux yeux, et un grand sourire.
Irina… mauvaise… au fond d’elle-même, Sadia savait que ce n’était pas vrai.

Sadia etait perdu dans ses pensées, qu'allait il advenir d'elle ? Se caché de qui ? De quoi ? Et surtout ou ?
Irina, ou au mieux celui qui la dirigeait, car Sadia en etait convaincu, la comtesse n'etait qu'un pion dirigé par une force superieure ... Mais elle etait en danger car Irina avait appris a controler les connaissances du Nox et le pouvoir qu'il lui conferait !
Fallait il qu'elle se laisse guider par le cristal noir et qu'elle suive aveuglement Maitre Inoué et ses compagnons, ou devait elle se fier a son instinct ...
Sadia ne savait plus qui croire, Luc avait l'air autant perdu qu'elle !
Il fallait qu'elle trouve un lieu neutre, ou elle pourrait avec Luc faire le point sur toute cette histoire, tout a coup elle se senti plus legere et comme aspiré a nouveau dans un autre univer, elle n'avait pas peur, une quietude reignait en ce lieux, elle savait qu'elle pouvait faire confiance a cette voix interieure d'homme, qui lui donnait une direction a suivre. En une fraction de seconde elle etait de nouveaux dans cette grotte, avec les autres...
- Sadia, ca va ? L'interrogeat Luc
- Oui juste un etourdissement, Maitre Inoué a raison, il faut qu'on se mette a l'abrit Luc. Je connais l'endroit ideal, reste a sortir d'ici sans se faire remarquer !
Les trois compagnons se regarderent avec surprise, ne comprenant pas ce revirement de situation dans l'attitude de Sadia.
- Ou voulez vous allez ? Questionna Noo
- Personne doit le savoir, sinon nous ne serions pas en securité !
Luc etait decontenancé, Sadia avait l'air sure d'elle, il s'emanait d'elle une drole d'aura, d'un mauve pale, les autres l'avait certainement remarqué !
- Il faut d'abord sortir d'ici, il y a certainement une autre issue lanca Luc a Hall
Les trois hommes se concerterent et au bout de quelques minutes, deciderent d'acceder a leur requette.
- Comment ferons nous pour savoir si vous avez besoin d'aide ?
- Vous le saurez repondit Sadia avec un petit sourire....

Maitre Inoué, Noo et Hall leverent les bras ensemble et apparu alors un halo lumineux, et en une fraction de seconde, Sadia et Luc etait sur la place du Capitole !
Au milieu de tout ce monde, ils etaient difficilement reperable, il fallait faire vite, Sadia se dirigea vers un point d'accueil pour touriste, pris quelques informations et rejoint Luc .
- Alors ou va t on ?
- Patiente un peu, nous avons des choses a prevoir...
En priorité il leur fallait trouver de l'argent, impossible pour eux de retourner a l'hotel, ni de se servir des cartes bleues. Il restait quelques billets a Luc, mais ce n'etait pas suffisant, Sadia sorti son plan et les voila deambulant dans la vieille ville, elle stoppa net devant une petite boutique de bijoux ancien, luc l'interogea du regard ...
- Donne moi ta chaine et ta gourmette...
- Mais qu'est ce que....
Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que Sadia s'engouffrait deja dans la boutique.
Surpris il lui emboita le pas et la suivi a l'interieur, elle avait oté a son tour sa chaine, sa bague et ses boucle d'oreille et les tendait deja au vendeur.
Luc avait compris, c'etait le seul moyen d'avoir des liquidités sans se faire reperer, il etait surpris d'une telle ingeniosité, Sadia lui plaisait de plus en plus ....
Ils reprirent leur route, direction la gare !!!
En chemin Sadia decida d'informer Luc de l'aventure qui les attendait.
Elle commenca par lui raconter son incertitude quand a Irina, Maitre Inoué, Noo et hall, ensuite son flash et la voix d'homme qu'elle avait entendu...
Ils s'approchaient de la gare :
- Quel est notre destination ?
- On prend le prochain train pour Carcassonne, de la nous prendrons un taxi Jusqu'a Limoux .... Ensuite on s'equipe pour la randonnée et nous finissons a pied !
- Pourquoi ?
- Notre trace s'arretera a Limoux si on nous cherche nous serons introuvable, de la nous prendrons la direction sud sur 22 Km !
- Pfffffff.... J'espere au moins que ca vaut le detour dit Luc
Sadia le regarda un immense sourire aux levres
- Ca le vaut, nous partons pour Bugarach !!!!

Une fois que nous arriverons là-bas, je connais un chalet équipé de tout le nécessaire pour vivre. Ainsi qu’un stock de nourriture en boites de conserve va nous permettre de nous reprendre le temps de faire le point de tous ce que nous venons de vivre.
Il nous faut prendre du recul et faire une pause pour réfléchir à la suite des événements.
C’est au soir que Sadia et Luc arrivèrent devant le petit chalet qui paraissait insignifiant à Luc. Effectivement de l’extérieur il n’y avait qu’une petite porte de vieux bois qui donnait l’impression qu’en donnant un coup de pied dedans elle allait s’effondrer.
Un vieux tapis devant l’entrée, Sadia, s’avança, leva le tapis et en sortit une clef rouillée.
Elle la prit, la mit dans la serrure et en la tournant, un grincement ce fit entendre. La porte s’ouvrit toujours avec le même bruit irritant les oreilles.
Luc lui demanda si elle l’emmenait dans les cavernes de la préhistoire.
Sadia explosa de rire, ce qui résonna dans le chalet.
C’était une salle vide avec de la poussière partout et des toiles d’araignées dans tous les coins. Elle se dirigea vers une vieille boite de conserve qui jonchait le rebord de la seule fenêtre du chalet.
Luc commençait à perdre patience et trépignait sur place, alors Sadia se retourna avec à nouveau une clef dans les mains.
Elle alla immédiatement à l’opposé de là ou elle avait pris la clef et appuya sur une vieille planche contre le mur en face d’elle. Là, apparut une serrure du dernier cri.
Sadia introduisit celle-ci dans le trou et fit un tour.
D’un seul coup Luc, sursauta et fit deux pas en arrière, une trappe s’ouvra devant ces pieds. Il put voir un escalier de béton en parfait état.
Il interrogea du regard Sadia.
Aussitôt elle descendit celui-ci et l’invita à la suivre.
Dès que tous deux eurent descendu quelques marches, la trappe se referma toute seule, alors Luc s’empressa de se baisser pour ne pas être blessé.
Celle-ci fermée, une lumière s’alluma et ils purent voir une très grande pièce ou se trouvait un beau salon et plusieurs portes.
Sadia expliqua ce qu’était ce chalet, qu’il appartenait à sa famille, qu’il avait été construit quand il y avait eu la menace nucléaire quelques années auparavant.
Elle fit une visite rapide du lieu, ouvrit les portes et montra à Luc que tout le confort était là et qu’ils allaient pouvoir enfin se reposer et réfléchir à la suite de l’aventure.
Pendant trois jours, tous deux vécurent dans ce lieu confiné et tranquille. Sans autre objectif que de se reposer.
Ces quelques jours permirent de faire le point.
Sadia profita de cette intimité avec Luc pour expliquer le doute qu’elle avait eu lorsqu’ils étaient avec maître Inoué, à propos d’Irina.
Qu’il fallait qu’elle soit sur, que la Comtesse Szczeskaya voulait vraiment détruire le neuvième Inframonde.
Luc lui demanda comment elle comptait faire pour rentrer en contact avec Irina sans se mettre en danger ?

Koltar entra dans la salle de contrôle aux murs tapissés de panneaux dans lesquels se mouvaient des formes et des couleurs changeantes. Une dizaine d'humanoïdes absorbés par leur tâche ne prêtèrent guère attention à lui. Il se dirigea vers Gohor, le chef de section, qui s'empressa de lui faire un rapide résumé des derniers évènements.

- L'attaque surprise a permis la destruction -du Nid d'espions- Superviseur Koltar.
Deux Poohals ont été supprimés, le troisième a disparu sans laisser de trace. Les Terriens se sont enfuis juste avant l'assaut, et se sont volatilisés dans la nature(1) !

- Excellent travail Gohor ! Lancez les Koatz sur leur pi...

Une alarme l'interrompit brusquement... Une petite sphère de surveillance pulsant une lumière bleue apparut sur le pupitre central. Koltar l'attrapa et dans un flash télépathique, elle lui transmit cet avertissement :

- "Attention !!! Intrusion dans le bunker 3 !! Ordonnez une fouille immédiate ! Urgence !! Forte probabilité de danger de degré 4/5 !!


Laissant Gohor inquiet, Koltar se rendit aussitôt dans la section réservée aux Koatz, de redoutables guerriers androïdes. Il en sélectionna un petit groupe qui l'accompagna jusque dans une vaste caverne naturelle du niveau 6. Dès qu'ils en franchirent le seuil, un des robots déjà prévenu de leur mission, s'activa. Un vortex s'ouvrit dans la paroi rocheuse, découvrant un tunnel souterrain. Un Zipp attendait les Koatz, qui s'engouffrèrent à l'intérieur. L'engin propulsé par des ultrasons démarra sans bruit à la vitesse de l'éclair...

- " Tuez les ennemis s'il y en a ! Sinon emparez-vous des Intrus ! Vivants, de préférence ! "

Tels avaient été les ordres du Superviseur Koltar.

Satisfait, il comptait maintenant se réserver cinq minutes de détente bien méritées, mais il n'en eut pas le temps. Un message mental le convoquait sur le champ à un debriefing. Il porta la main sur son plexus solaire, appuya sur le translateur intégré à son uniforme, qui le fit disparaître et le transféra dans le Quartier Général où une vingtaine de Superviseurs attendaient la venue de la Grande Coordinatrice Siilla.
Une douce vibration se propageait dans tous les étages, sous leurs pieds un immense Vaisseau reprenait vie.
Soudain une très grande jeune femme brune excessivement mince, se matérialisa parmi eux. Son visage mat et étroit reflétait la détermination, ses grands yeux jaunes, envoûtants, s'étiraient vers ses tempes.
Ces caractéristiques physiques se retrouvaient chez tous ceux de sa race.

Pendant la réunion chacun fit un exposé détaillé de l'avancée des projets en cours et conforta chacun sur le bien-fondé des décisions prises. L'animosité et les frappes des Poohals avec à leur tête Maître Inoué, se durcissaient de jour en jour. Ils convoitaient le Neuvième Inframonde...

La scéance à peine terminée une vive agitation survint dans le sixième niveau. Averti du tumulte Koltar se translata sans attendre. Dans sa précipitation, l'esprit préoccupé et mal concentré, son transfert fut un échec, à son arrivée il se retrouva imbriqué dans la paroi rocheuse. Pendant ce temps ça chauffait dans la caverne. Les poignets liés derrière le dos, Sadia et Luc, furieux, se débattaient tels des fauves.
Sadia lançait de violents coups de pieds dans les tibias de ses gardes-chiourmes, impassibles à la douleur. Elle mordait les bras ou les mains qui passaient à sa portée. De son côté Luc ne distribuait pas des bonbons non plus !

Stoppant net un de ses élans vengeurs, Sadia, le regard rivé, découvrait avec étonnement le Superviseur empêtré, elle pouffa de rire à la vue de Koltar coincé dans le rocher, l'air abruti par sa déconvenue.
Habilement il se dégagea et rejoignit la mêlée en essayant de rassurer les deux belligérants qui cessèrent toute révolte. On les libéra enfin de leurs liens.
Le Superviseur les invita à rejoindre Siilla la Grande Coordinatrice, tenue au courant de leur arrivée houleuse.

-"Que signifie tout ceci ? Qui êtes-vous ? S'indignèrent Luc et Sadia. Un influx mental les apaisa, Siilla les pria de s'installer dans de confortables fauteuils, on apporta des plateaux garnis de mets très appétissant et des boissons. L'accueil devenait plus convivial.
Après s'être copieusement restaurés, les deux compagnons d'infortune prirent le temps d'examiner les lieux. Des paysages à couper le souffle s'animaient sur les murs couverts d'un ciel teinté d'orange et de rose. Le jour se levait. Siilla les observait à la dérobée, légèrement amusée de leur stupéfaction.
Elle les ramena gentiment à la réalité et se proposa de répondre à leurs questions et d'éclaircir certains points concernant sa présence et celle de ses congénères dans le coin.

- La crainte de l'anéantissement imminent de leur monde -Erytar, contraignit, expliqua-t-elle, son peuple à fuir vers un autre univers, en l'occurrence le nôtre.
Douze mille ans avant notre ère ils s'installèrent au sein des Pyrénées où vivaient, retranchés du monde extérieur les Lumaniens, qui tolérèrent leur présence près d'eux et le métissage entre leurs races. Ce fut un accord décisif et bienvenu pour la survie des deux espèces sur le déclin.
La très ancienne civilisation Lumania avait vu le jour il y a 500 000 ans, bien avant l'apparition de l'Atlantide et de Mu. Ils se dispersèrent ensuite vers d'autres cieux, à la recherche de nouvelles expériences, cent mille ans plus tôt. Une poignée d'entre eux choisit de rester sur la Terre. Les Lumaniens avaient développé une technologie surpassant de loin celle des êtres humains actuels, ils cohabitaient avec une culture très primitive, dispersée et très inorganisée. Craignant viscéralement leur violence, ils laissèrent en paix les indigènes et se replièrent dans des cavernes qu'ils aménagèrent.

Le peuple de Lumania avait perfectionné la communication en images mentales, issues des sons qui bâtissaient automatiquement et instantanément des images vivantes dans leurs esprits. Ils utilisaient le son très efficacement dans les domaines de la médecine, la guerre, mais aussi comme force motrice des véhicules et pour mettre la matière en mouvement. Le son était convoyeur de poids et de masse.


Les Erytariens, venus d'un univers différent, durent s'adapter à notre monde physique. Les Lumaniens acceptèrent de partager leur savoir avec eux, dès lors ils purent ainsi apprendre à stabiliser leurs corps éthérés dans des organismes faits de chair et de sang. Ensuite ils passèrent à l'étape de la manipulation de la matière grâce aux connaissances sophistiquées de leurs alliés dans le domaine des Ultrasons.
Récemment des évènements imprévisibles fomentés par les Poohals -originaires de la planète Pooha-, ils durent s'impliquéer sérieusement dans les affaires Humaines et d'accélérer le processus de réveil de tous les survivants d' Erytar, que l'on doit doter rapidement de corps physiques avant qu'ils ne se perdent à jamais dans le néant, une fois le réveil amorcé...
A la fin de la longue tirade de la Grande Coordinatrice, Sadia et Luc se consultèrent du regard.
-Où sommes-nous exactement ? Questionna Luc
- Sous le Mont Buggarach, répondit Siilla, stoïque.

__________

(1) Traduction imparfaite due à la différence des ondes mentales des Erytariens et des nôtres.

On avait conduit Sadia et Luc dans une chambre, pour qu’ils puissent se reposer. Les murs étaient toujours lumineux, comme des tapisseries vivantes, montrant un monde totalement inconnu. Luc était complètement abasourdi.
« _ Voir tout ce dont Szczeskaya était capable, c’était une chose, mais de là à imaginer tout ça… »
« _ Ce n’est pas la vérité… »
« _ Pardon ? »
Sadia s’était assise sur une banquette, songeuse, regardant le sol.
« _ Elle m’avait prévenue, elle me l’avait dit… On allait nous mentir… »
« _ Qu’est ce que tu racontes Sadia, de quoi tu parles ? »
Sadia ne répondit pas, elle se rappelait. Elle se rappelait ce moment, cet instant, fugace, au moment de sa fuite, avec Luc. Irina l’avait appelée, la tête dans l’entrebâillement de la porte de la cabane. Alors qu’elle fuyait, Sadia s’était retournée, elle l’avait vue, elle avait vu la détresse d’Irina, ses yeux pénétrant qui cherchaient désespérément à trouver les siens.

« _ Reste Sadia, je t’en prie, ne me laisse pas… »
Les regards de Sadia et d’Irina se croisèrent. En une fraction de seconde, le temps s’arrêta. L’air s’emplit d’un brouillard étrange, les bruits s’estompèrent. Irina parla. Non, elle pensa. Tout était immobile, seules les pensées voyageaient.
« _ Sadia, tu me fais confiance Sadia ? Moi j’ai confiance en toi… »
« _ Que… Qu’est ce… »
« _ Ecoute moi Sadia. Tu vas rencontrer des êtres étranges, beaucoup plus étranges que moi. »
Sadia ne comprenait pas ce qui lui arrivait. La voix cristalline d’Irina résonnait dans sa tête, elle lui semblait si douce, et si impérative en même temps.
« _ Ils vont te raconter des histoires incroyables, chacun va vouloir t’attirer à lui, te faire choisir son camp. »
« _ Mais, Irina, de quoi tu parles… ? »
« _ Méfie toi Sadia. Ils te mentiront, tous. Ils vont vouloir t’avoir avec eux. Car tu es comme moi, tu es spéciale. »
Sadia flottait toujours dans l’incompréhension, mais, au fond d’elle-même, elle se sentait prête à suivre Irina les yeux fermés.
« _ Qu’est ce que je dois faire… ? »
« _ Vas au mont Bugarrach ! Il y a un chalet pas très loin. Tu dois t’y rendre. Là-bas, tu pourras atteindre le mont Bugarrach. »
« _ Mais… comment ? »
« _Cela se fera tout seul. Ils te surveilleront. »
« _ Mais qui ça « ils » ? »
« _ Le Neuvième Inframonde, nous sommes un danger pour eux. »
La voix d’Irina semblait vraiment inquiète.
« _Promets moi de le faire Sadia, je t’en prie… »
Sadia était déboussolée, mais elle répondit instinctivement.
« _ Oui… j’irai… »
La Comtesse eut une pensée, comme un sourire.
« _ Je serai là quand tu auras besoin de moi. Tu sauras me faire venir à toi. »
Sadia sentit de la tristesse dans sa voix.
« _ Je ne veux pas te perdre Sadia. Tu comptes tellement pour moi… prends soin de toi… »
Sadia fut ramenée brutalement à la réalité lorsque Luc la tira par le bras, et l’entraina en dehors du domaine de la Comtesse.

Assise sur sa banquette, Sadia se repassait chaque phrase dans sa tête. Elle murmurait.
« _ Tu sauras me faire venir à toi… »
« _ Hein ? »
A coté, Luc ne comprenait rien à l’attitude de son amie.
« _ Tu sauras me faire venir à toi. Comment je pourrais la faire venir à moi… ? »
Luc s’assit lui aussi, ne cherchant plus à comprendre. Il remarqua alors quelque chose.
« _ Sadia… Sadia ! »
« _ Uh ? Quoi ? »
« _ Tu… brilles… »
Sadia se regarda. Ses tatouages brillaient. Chaque signe luisait d’une lumière douce et chaude. Bizarrement, cela ne l’inquiéta pas, cela lui semblait comme naturel. Elle ferma les yeux. La lumière s’accrut, libérant des filaments qui se déplièrent lentement dans toute la pièce. Luc s’était levé et reculait.
« _ C’est… c’est pas normal ça… Sadia ! »
Elle ne répondit pas. La lumière emplissait tout l’espace, puis elle se concentra, devant Sadia. Alors une forme humaine en sortit. Sadia ouvrit les yeux, et leva la tête.
« _ Irina… »
La lumière cessa. La Comtesse se tenait là, face à Sadia, toujours aussi élégante, toujours aussi belle. Sadia se leva.
« _ Tu as réussi Sadia. Le lien qui nous uni est si fort… »
« _ Tu es là Irina… »
« _ Oui… »
Sadia souriait. Elle ne comprenait pas pourquoi, mais voir Irina l’emplissait d’une immense joie. La Comtesse aussi lui souriait. Elle s’était rapprochée. Les deux femmes ne se quittaient pas des yeux, comme si un fil invisible liait leurs regards. Irina s’approcha encore.
« _ J’ai eu si peur pour toi Sadia… »
« _ J’avais confiance, je savais qu’il ne m’arriverait rien. »
Sadia aussi s’était avancée, elles étaient maintenant à quelques centimètres l’une de l’autre. Le fil entre leurs regards se raccourcissait, rapprochant irrésistiblement leurs visages.
« _ Je n’aurai pas supporté de te perdre… »
Sadia se sentait flotter, ailleurs, il n’y avait qu’elle, et la Comtesse. Irina était presque sur la pointe des pieds, Sadia sentait le souffle de la Comtesse sur son visage. Ses lèvres étaient de plus en plus proches, à porté des siennes…
« _ Non là, je peux plus moi ! Comment vous êtes arrivée ici ? »
Sadia sursauta, Irina tourna lentement la tête vers Luc, qui venait d’interrompre ce moment magique. Le regard qu’elle lui lança le fit se reculer d’un pas, ses yeux semblaient le regarder comme un insignifiant moustique juste avant qu’il ne se fasse écraser. Sadia reprit ses esprits.
« _ Irina ! Elle… Siilla, elle a dit qu’ils étaient des êtres sans corps… Et Inoué, c’était la même chose, il était dans le corps de Michael. »
« _ Je sais. Je me suis employée à faire croire à cet imbécile d’Inoué que je voulais envahir son monde. »
« _ Comment ? »
Luc venait encore d’ouvrir la bouche, et à nouveau, la Comtesse lui lança un regard de travers lui faisant comprendre qu’elle ne voulait plus entendre le son de sa voix. Elle enchaîna.
« _ Ce sont eux, qui préparent une invasion. L’invasion de notre monde, par des êtres éthérés dont le seul but est de parasiter les corps des humains. Une planète peuplée d’enveloppes qu’ils vont pouvoir habiter ! »
Sadia restait la bouche ouverte, stupéfaite. Irina continua.
« _ Alors je ne sais pas quels sont les problèmes entre Inoué et les autres, je sais juste qu’ils viennent tous du même endroit, et qu’il y a des dissensions au sein de leur peuple. Mais je ne compte pas envahir leur monde… »
La Comtesse semblait déterminée.
« _ Je vais renvoyer tout ce petit monde chez lui, dans leur Neuvième Inframonde et fermer les portes pour de bon ! »
« _ Mais… tu savais déjà tout ça, lorsque… »
Irina devint plus douce, et sourit, comme pour s’excuser.
« _ Quand j’ai su que tu étais passée dans le Nox, j’ai compris que toi et moi, nous étions liées. Qu’à nous deux, nous pourrions enfin les faire échouer. J’ai du te mentir moi aussi, un peu… »
Elle ferma les yeux.
« _ Mon passage dans le Nox a été plus long que le tien. Ces êtres n’ont aucune barrière mentale, je pouvais tout recevoir d’eux, et j’ai compris ce qu’ils projetaient pour nous. »
Sadia était en pleine confusion. Mais enfin, pour une fois, elle sentait qu’on lui disait la vérité.
« _ Et… on fait quoi maintenant ? »
« _ On attend qu’on vienne nous chercher. »
« _ Comment ça ? »
« _ Tu penses bien qu’on doit savoir que je suis arrivée ici, depuis un moment. »
Irina souriait. Son regard avait changé, c’était la prédatrice qui parlait.
« _ Nous sommes exactement où il faut, au moment où il faut. Toi, et moi… »
Soudain, plusieurs Koatz firent irruption dans la pièce.
« _ Personne ne bouge ! Rendez-vous ! »
Sadia et Luc sursautèrent. Irina tourna lentement son sourire inquiétant vers les androïdes.
« _ Voilà mon comité d’accueil… »
« _ Intrusion ! Intrusion ! Le sujet doit être appréhendé ! »
Sadia était inquiète, mais elle était surprise de l’attitude de la Comtesse. Aucune trace de peur sur son visage. Au contraire, elle dégageait une telle assurance que Sadia l’imaginait capable de renverser à elle seule les cinq monstres face à elle. Pourtant, Irina ne bougea pas. Sadia s’était presque collée à elle.
« _ Et… on fait quoi là… »
Irina lui passa une caresse apaisante sur le bras, et lui prit tendrement la main.
« _ On va suivre ces charmantes personnes… »